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    Petit conte fantasque

     

                                           « Les heures peu à peu s’égrènent au beffroi

                                          « Le clocher carillonne le jour, par trois fois

                                          « Puisse Mesdames, le petit conte que voici,

                                          « Servir Messieurs, la mémoire des gens d’ici

     

    Il était une fois une vieille horloge accrochée à son beffroi. La vieille dame se permettait une coquetterie qui donnait un petit charme discret à notre village.

     

    Oui ! Les gens d’ici avaient bien de la chance ! L’horloge du beffroi avait toutes les attentions pour eux. Elle « prévenait » les habitants de Saint Fargeau qu’il « VA ÊTRE L’HEURE ».

     A chaque heure, à chaque demi-heure, tout au long du jour et de la nuit, l’horloge du beffroi sonnait fidèlement dix minutes à l’avance. Le préposé municipal avait beau s’ingénier, en vain mais patiemment, à remédier à cette fantaisie, rien n’y faisait ! Il ne fallait guère de temps pour que l’horloge contrariée, ne ralentisse et peu à peu qu’elle ne revienne à sa sollicitude.

     

    C’est ainsi qu’à 6h 50 le fargeaulais qui travaille entendait l’horloge en hiver qui disait :« Il est temps, les amis, faites chauffer le diesel ; enfilez vos manteaux ; il va être l’heure de partir travailler »

     

    A 7h50 elle s’occupait des enfants : « Allez allez, finissez vos tartines petits écoliers et vérifiez vos cartables. L’école vous attend ».

     

    A midi moins dix, la bonne fille encourageait : « je sais, je sais, vous avez faim ! Encore dix minutes chers fargeaulais et la pause déjeuner arrivera. Dix minutes ce n’est pas grand-chose ! allez courage ! »

    Toujours bonne mère, l’horloge continuait sa tâche journalière. Elle savait très bien comme le travailleur et l’écolier aimeraient prolonger l’instant de la pause pour digérer leur déjeuner.

    A 13h 20 elle les secouait gentiment « Il est temps chers amis, la sieste c’est pour Dimanche ! Il est temps, !» et selon le cas, elle bousculait son monde : « Allez, allez ! au bureau ! à l’atelier ! à l’usine ! au collège ! la journée continue !»

     

    Un chef de gare qui faisait du tourisme dans notre ville, découvrant l’indiscipline des engrenages et roues dentées s’offusqua bruyamment. : « Où va-t-on clama-t-il à la ronde si l’heure ne donne plus l’heure et trompe les gens ?! Mes trains, comment je ferais pour mes trains si mes horloges n’en faisaient qu’à leur tête ? »

    Un fargeaulais débonnaire qui passait par là lui dit : « Non Monsieur, l’ordre règne ici. Marie Charlotte Geneviève* veille. Trois fois le jour, avec la précision du métronome, à 7h, midi, 19H, elle sonne l’Angélus du haut de son clocher. Elle rappelle aux croyants leur dévotion mariale, ainsi qu’à tous les villageois, leurs obligations quotidiennes. »

    Voilà comment à Saint-Fargeau les jours s’égrainaient rituellement.

    Tout au long de l’année et par-dessus les toits, nous n’échappions pas au dialogue multiséculaire qui nous dépasse et rythme notre civilisation.

     

    Or, par un jour de terrible orage, Zeus dans sa colère abattit sur le beffroi, ses éclairs. De long mois durant, la vieille horloge blessée cessa de nous parler.

    Mais un savant ingénieur électronicien fut enfin appelé. Il a ouvert le ventre de la malheureuse, sorti les roues dentées, les clous, les vis rouillés et les ressorts distendus. Il a greffé un mécanisme inoxydable et électronique.  Tout est aux normes désormais.

    Plus de fantaisie dans nos heures qui passent. Plus de dialogue entre les cloches.

    Les esprits chagrins vous diront que désormais elles font chorus et ne s’écoutent plus.

    Les coeurs joyeux n’auront aucun mal à leur rétorquer « Mais non, mais non. ! Enfin elles chantent à l’unisson. »

     

                                                                   Pour aller plus loin

     

    De quand date l’horloge du beffroi ?

    La construction du beffroi date de la construction de la porte de la première enceinte, fin XV° ou début XVI°.  L’élévation élégante de la toiture est un peu plus tardive. Elle se situe vers 1575 lors de la construction de la deuxième enceinte.

    Est- ce au moment de cette modification que l’on songea à doter la tour d’une horloge ?

    On ne sait pas. Mais voici ce que relate M. Déy dans « Histoire du Comté de Saint-Fargeau »

    « Quant à l’horloge de la ville, le fait est que dès 1761, elle était en mauvais état et que toutes les dépenses qui furent affectées à la réparer ne purent en prolonger l’existence décrépite que jusqu’en 1789, époque où Etienne Jamet maître serrurier et horloger en gros à Léré fut chargé d’en faire une nouvelle qui fut installée six mois plus tard… L’horloge de maître Jamet ne dura qu’une cinquantaine d’années. Le Conseil Municipal le 26 décembre 1834, vota la somme de 200 francs pour l’acquisition d’une nouvelle horloge. Le sieur Rousset, horloger à Saint-Fargeau, offrit d’entretenir la nouvelle horloge pendant 6 ans au même prix que pour l’entretien de l’ancienne horloge (soit de 250frs). Son successeur, M. Joran moyennant une augmentation du prix de l’entretien continua la tâche à partir du 28 février1864. »

    En 1881 le Conseil Municipal décide outre les vieux cadrans de l’est et de l’ouest, de doter la tour de deux autres cadrans, un au nord et un au sud.

    « Je pense que depuis lors, c’est toujours le même mécanisme » poursuit M. Déy.  « Lorsque j’étais enfant, M. Draps horloger était chargé du remontage et de l’entretien de l’horloge, puis ce fut le plombier Billebault dit « soudure » qui se chargea du travail et enfin la tâche échut au garde champêtre ».

    Dans le N° 145 du très précieux « Puisayen », on trouve : « En 1983 le mécanisme donna des signes de faiblesse. (à la demi, elle s’arrêtait, puis, reprenait son cours). Henri Salin, serrurier confia à son neveu Michel Fourneau, ingénieur des Arts et Métiers le soin difficile de résoudre le problème.  Celui-ci réussit à réaliser une boite contenant les engrenages qui commandaient les tiges des 4 cadrans. »

    Mais les saisons ont fait leur œuvre sans relâche comme le suggère le petit conte ci-dessus. La mairie a fait appel à la société « Plaire Horloge » située à Sérézin dans le Rhône. Il a fallu doter le mécanisme d’un boîtier électronique un peu trop petit cependant pour actionner les quatre cadrans. Depuis ce temps-là, seuls deux cadrans donnent l’heure… à l’heure !

     

    *Qui est donc Marie Charlotte Geneviève ?

     

    Le clocher abrite la plus vieille cloche de Puisaye. Elle datait de 1502.

    Cette cloche a été fêlée à l’occasion de l’armistice de 1918. Le préfet avait ordonné que les cloches sonnassent à toute volée la joie immense de l’armistice. Trop d’émotions pour cette vieille dame fragile ! Elle ne résista pas à cet enthousiasme. En 1960, le bronze de la cloche d’origine fut fondu dans l’atelier du fondeur Jean Bollée.  C’est ainsi qu’elle donna naissance à celle d’aujourd’hui. Cette cloche nouvelle a été baptisée en grande pompe le 11 décembre 1960 par Monseigneur Lamy archevêque de Sens. Elle a eu pour marraine Marie Anisson du Perron, marquise d’Ormesson et pour parrain Henri Bourgoin, maire de Saint Fargeau assisté de ses adjoints Fernand Giraud et Maurice Rousseau. Elle Pèse 952 kg. Elle est électrifiée.

    Sur cette cloche figure l’inscription :

    « JE REMPLACE CHARLOTTE GENEVIEVE QUI FUT BENITE EN 1706 ET DONT LA VOIX FUT BRISEE LE 11 NOVEMBRE 1918 DANS L’ALLEGRESSE DE LA VICTOIRE »

     

     

    Que signifie la volée de cloche trois fois par jour ?

     

    La cloche sonne l’Angelus. C’est une prière latine qui commence par le mot Angelus. Il désigne l’ange Gabriel annonciateur à Marie, de la venue du Christ. Elle se récite matin, midi et soir en commémoration du mystère de l’Incarnation ; cette même prière se dit de nos jours en français. La sonnerie des cloches, trois fois par jour, annonce l'heure de cette prière.

     

                                                                                                                            Brigitte Demay de Goustine

     

     

     

     


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    "Le Bulletin " n°4

     

    Le bulletin N°4, consacre deux grands articles aux activités métallurgiques de notre région : L’histoire du fer en Puisaye de l’antiquité à nos jours et un article bien sûr centré sur le développement de l’entreprise Noguès sur un siècle.

     

     


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    Journées du patrimoine de pays et des moulins 2022

     

    24° édition des Journées du Patrimoine de Pays et des Moulins (JPPM).

    Thème de cette année : « Naître et Renaître ».

    Le samedi 25 juin à 15h nous vous donnons rendez-vous devant le musée de l’Aventure du Son.

    Le thème national cette année est « ÊTRE et RENAÎTRE »

    Or il se trouve que le quartier de la place de l’Hôtel de Ville (future place des Augustins) et de la place Alphonse Schmitt sont l’objet de divers projets municipaux :  la nouvelle mairie va voir le jour grâce à la réhabilitation de l’ancienne école des filles. La mairie actuelle deviendra le siège de la future Communauté de Communes et bien d’autres aménagements encore vont rénover ce quartier.

    Une exposition vous montrera l’ensemble des projets, puis, une balade dans le quartier vous fera découvrir sa longue histoire.

     

     

    voir le site national en cliquant ICI

     

     

     

     

     

     


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    NOS RENDEZ-VOUS POUR 2022

     

    Premier semestre 2022 :

     

    * Assemblée générale des adhérents le 14 mai 2022

     

    * le 18 juin 2022 de 10 à 13h

    Exposition pour le centenaire de Noguès, dans les locaux de l'entreprise Noguès

     

     

    * Edition du "Bulletin" n°4

         Les industries de fer de l’âge du fer à nos jours

         Victor Leloup, un taillandier haut en couleur

          Noguès cent ans de bâtiment métallique

     

    Samedi 25 juin, après-midi

    24° édition des Journées du Patrimoine de Pays et des Moulins (JPPM).

    Thème de cette année : « Naître et Renaître ».

    Ballade autour de le future place des Augustins à la découverte de l’histoire et des projets de rénovation du patrimoine bâti dans ce  quartier .

     

     

     

       Deuxième semestre 2022

     

    *  En juillet 2022

    A la rencontre d'une équipe d'archéologues dans le bois de Bailly

     

    * Du 22 octobre 2022 au 2 novembre2022

    EXPOSITION  « L’industrie du fer : de l’âge du fer à nos jours »

                          de 10 à 12h et de 14 à 17 h dans la galerie à arcades du musée de l'Aventure du Son.

                          Place de l' Hotel de Ville à St Fargeau 89170

                          Le vernissage aura lieu le samedi à 17h.

     

     

     

     

     

     


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    Guerre, exode, occupation…

    Chaque jour amène son lot de bien tristes nouvelles en provenance d’Ukraine ou d‘ailleurs.
    La France, nos villes et villages, ont connu aussi ces mêmes évènements au cours de la seconde guerre mondiale.
    En 1942, à Saint-Fargeau, l’occupation allemande était installée au château ou dans nos belles demeures bourgeoises. Ce fut le cas de la propriété de la famille Provot, rue Porte Marlotte. Jacques nous a proposé le texte ci-dessous qui raconte la guerre vue par des yeux d’enfants.

    En 2022, heureusement, l’amitié franco-allemande au sein de l’Europe nous garde de revivre de telles dramatiques situations sur notre sol.

     

    Vivre pendant la guerre avec les soldats allemands dans notre maison (1940-1942)

    Par Jacques Provot 

    Mes souvenirs sur la présence des soldats allemands dans notre maison pendant la guerre de 1940-1945, sont vraiment très éloignés. Pour nous les enfants ce qui importait le plus c’était la grande cour pavée, c’était le jardin, c’était les communs où nous avions l’habitude de jouer entre nous ou avec nos amis Blondet qui habitaient dans la même rue, juste en face.  

    Aussi voir notre domaine privé occupé par des soldats allemands nous était insupportable. Ils étaient dans la cour, dans le jardin, où ils allaient  et venaient même avec leurs voitures. Ils s’asseyaient sur le petit mur qui nous servait de siège, où nous discutions longuement. Ils jouaient avec la balançoire accrochée au portique, à côté des anneaux et de la corde à nœuds. Ils foulaient de leurs bottes, sans vergogne, notre domaine.  

    Aussi nous les regardions avec animosité et nous avons imaginé des actions de « combat » en quelque sorte. Elles n’étaient pas toutes anodines et certaines auraient pu avoir de vraies conséquences. Mais nous ne pouvions pas nous en rendre compte. 

    Le bombardement

    Ainsi lorsque nous avons « bombardé » un convoi militaire qui passait sous la terrasse de plein air de la famille Blondet, qui dominait l’avenue actuelle du Général Leclerc. Cette terrasse était bordée de marronniers et c’est cette particularité qui nous a donné l’idée de faire provision de marrons pour nous en servir de projectiles. Ce soir-là nous avons « arrosé » les camions pleins de soldats qui se présentaient sous nos yeux. Lorsque je lançais un marron j’avais un peu peur, mais je ne voulais pas qu’on le remarque. Nous étions très excités, on s’encourageait les uns les autres, on se prenait pour des soldats en train de défendre la France.  

    Je dois dire que j’ai beaucoup pensé à cette anecdote, 15 ans plus tard, lorsqu’en Grande Kabylie j’ai dû traverser en camion bâché, les gorges de « Palestro ». Je me disais à chaque passage « attention aux marrons » !

    Les cigarettes

    Chaque jour nous nous retrouvions avec nos copains. Il y avait surtout les enfants Blondet, parfois les enfants Droux, avec qui nous formions une bande bien décidée à provoquer les soldats allemands, puisque ces derniers passaient une bonne partie de leur temps dans nos espaces de jeux. Les plus grands eurent un jour l’idée de fabriquer des cigarettes pour faire comme les adultes. Il suffisait de remplacer le tabac, que nous n’avions pas, par des feuilles de tilleul séchées, écrasées avec les doigts et roulées avec du papier fin. Notre fabrique de cigarettes fonctionnait à l’abri des regards, au premier étage du hangar où notre grand-père rangeait le bois de chauffage.  

    Un jour l’un de nous eut une autre idée géniale : celle de prendre un paquet de cigarettes à l’officier allemand de service chez nous. Non pas pour les fumer entre nous, mais pour faire une bonne blague. L’idée était de les remplacer tout simplement par nos cigarettes de tilleul. On en riait d’avance. Mais qui pouvait faire cet « emprunt » sans se faire remarquer ? 

    L’officier s’était installé sans discussion dans le bureau du grand-père, qui donnait directement sur la rue Porte Marlotte. Loulou Blondet, 8/9 ans comme moi, mon meilleur copain, avait déjà vu l’officier fumer devant la table où il travaillait. En effet en venant chez nous Loulou passait souvent devant la fenêtre du bureau et il voyait fort bien à l’intérieur. Il avait remarqué que l’officier  posait volontiers son paquet de cigarettes sur le bord de sa table de travail.  

    Alors il fut décidé de nous confier la noble tâche patriotique de subtiliser le paquet de cigarettes et de le remettre en place avec les cigarettes artisanales. Alors nous avons fait le guet, pour attendre le bon moment. Il fallait en effet que l’officier soit absent et que le paquet de cigarette soit sur la table. 

     Or même si nous n’étions plus libres chez nous, nous pouvions passer par le couloir qui allait de la rue Porte Marlotte à la cour pavée de la maison. Sur les murs de ce couloir étaient accrochés des casques de de la guerre de 14-18, et quelques vieux fusils de collection, inoffensifs. Ces objets guerriers rassemblés par mon grand-père, ancien officier de réserve, me fascinaient. J’en rêvais. J’imaginais des combats victorieux. Et pour moi l’action en cours était un vrai combat.  

    Nous avons donc fait plusieurs fois des allers-retours dans le couloir, en feignant de contempler les vieux fusils. Et lorsque nous avons vu l’officier allemand quitter son fauteuil pour monter au premier étage où il avait sa chambre, nous avons aussitôt pénétré dans le bureau et par chance le paquet de cigarettes était sur la table. Alors nous l’avons emmené avec nous et donné aux artisans cigarettiers qui firent l’échange du contenu très rapidement, car les cigarettes au tilleul étaient prêtes pour l’expédition. Et bien entendu lorsque l’officier revint dans son bureau le paquet de cigarettes était à sa place initiale. Et j’étais avec Loulou dans la rue à côté de la fenêtre, en jetant un coup d’œil de temps en temps, pour voir. Et nous avons vu l’officier prendre son paquet pour en tirer une cigarette, la regarder avec étonnement et…fixer son regard sur nous, car au même moment nous retenions nos rires derrière la fenêtre. Mais en réalité nous n’étions pas à l’aise. De la main il fit un geste peu rassurant et il avança vers nous, l’air menaçant, ouvrit la fenêtre en faisant mine de nous sauter dessus. Alors poussés par la crainte d’une punition physique, nous effectuâmes une retraite stratégique en nous sauvant à toutes jambes par le couloir, la cour pavée, et le grand thuya, notre cachette habituelle. Et à ce moment-là mes frères et le groupe des fumeurs semèrent la confusion en courant dans tous les sens et en se camouflant à leur tour, car l’officier était derrière nous et il fit le tour du thuya, l’air menaçant.  

    Aussi comme notre dose de courage diminuait à vue d’œil nous reprîmes la fuite pour surgir brusquement dans la salle à manger où se trouvait ma mère. Celle-ci était en délicate découpe de tissu, penchée au- dessus de la table, avec une paire de ciseaux à la main. Elle n’était pas seule, car une dame assise sur une chaise, reprisait des chaussettes. Or il se trouve que la table était recouverte  d’un drap qui débordait sur les côtés jusqu’au sol. Alors sans explication nous avons plongé sous la table. Mais « qu’est-ce que vous faites » disait ma mère à notre intention alors que l’officier entrait à son tour, après avoir poliment frappé à la porte. Et c’est ce dernier qui raconta toute l’affaire, en bon français. « J’ai aussi des enfants, disait-il, je comprends que c’est difficile pour vous qui êtes veuve de bien élever les vôtres, mais vous devriez leur tirer les oreilles. »

    Les casques

    Chaque jour je voyais quelques soldats s’asseoir sur le petit mur qui domine la cour pavée. Ils parlaient entre eux et bien sûr je ne comprenais pas ce qu’ils disaient. Mais je détestais les voir là, tranquillement installés au soleil, à la place de mes copains et moi, car c’était notre place.  

    Un jour l’un d’eux arriva avec dans les mains un casque, que je reconnus aussitôt car c’était le fameux casque Adrian de la guerre d’avant, celle de 14-18, qui équipait les soldats français. Il provenait de la collection de mon grand-père qui avait exposé plusieurs casques, dont un casque allemand et le casque Adrian, côte à côte.  

    Le soldat allemand avait décroché le casque français, mais pour quoi faire ? J’étais à la fois inquiet et curieux de voir ce qui allait se passer. D’autant plus que pour moi ce casque était celui de mon oncle Albert tué le 6 octobre 1915, au cours de l’attaque de la butte de Tahure, non loin de Reims.  

    Et je vis se dérouler des gestes incroyables sous mes yeux incrédules : le soldat avait posé le casque sur le mur et de l’autre main qui tenait une grosse pierre il frappait de toutes ses forces sur le casque. Caché derrière la petite fenêtre du hangar j’étais comme cloué au sol, sidéré. Chaque coup donné était un coup que je ressentais moi-même. Enfin lorsqu’il arrêta de cogner, le soldat montra à ses collègues le casque français complètement cabossé, ce qui les fit beaucoup rire. Puis ils allèrent remettre le casque abîmé à sa place initiale au milieu des autres casques de l’exposition.  

    Notre vengeance ne se fit pas attendre. Le soir même l’un de nous décrocha le casque allemand, et dans le fond du jardin nous lui fîmes subir le même traitement brutal, à coup de pierres. Puis ce fut l’acte final : le retour du casque allemand complètement cabossé, à côté du casque français.    

     

    Je me souviens un peu de leur départ définitif de notre maison du 10 rue Porte-Marlotte, je sais que c’était en 1942, mais je ne connais pas la date exacte.  

    Ce jour-là  j’avais 10 ans et j’étais devant la cuisine de mes grands-parents, qui donnait sur la cour pavée. J’étais avec ma mère, mes 2 frères et ma petite sœur.  Mes grands-parents étaient devant la porte de leur salle  à manger. La cour pavée était pleine : il y avait des soldats qui chargeaient un camion sans bâches et d’autres véhicules plus petits. Ma mère disait : ils partent en Russie. Mais soudain elle s’est mise à crier : ils partent avec mes affaires!  Et elle répétait : Mais c’est à moi ! C’est à moi ! 

    Les soldats, assis dans le camion, la regardaient sans rien dire, 

    Voilà, c’est avec ce cri de colère  de ma mère que les soldats allemands sont partis de chez nous. 

     

    Jacques Provot (2020)

     

     

       

     

     

     

     


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    Le Bistrot du Château

     

    La place Alphonse Schmitt revit.

    Après la réhabilitation de l'ancien abattoir (Axa) et l'aménagement de places de parking, c'est maintenant le bâtiment voisin qui renaît sous le nom de "Bistrot du Château".
    Il nous est apparu intéressant d'essayer de retracer l'histoire de ce nouveau commerce.

     

    Le Bistrot du Chateau à St Fargeau

     

    Dos à l'actuelle mairie, en regardant vers le Sud-Ouest, on peut admirer un des plus anciens quartiers de St-Fargeau, sur la rive gauche du Ru de Bourdon qui coule à nos pieds.
    La rue du Petit Pont, à gauche, est une des plus belles de St-Fargeau avec, au fond,  une très vieille maison à pan de bois, peut-être du XIIIe siècle. Cette ruelle, qui longe les anciens fossés de la vieille ville (le Berle) depuis la Porte de l'Horloge et jusqu'au Petit Pont, s'est appelée "Rue des Fusiliers" au XVIIIe siècle, "Passage Vauvert" au début du XIXe. Sur la gauche, un bâtiment en longueur, perpendiculaire à la rue, couvert d'une toiture en zinc, paraît anachronique, mais il est témoin de l'architecture industrielle de son époque. Cette rue franchit le Ru de Bourdon par le Petit Pont ou Pont des Religieuses, élargi maintenant par la terrasse du Bistrot. En amont se trouvait un lavoir actuellement démoli.
    Plus à gauche, (en dehors de la photo), la Rue Jacques Cœur n'existe que depuis 1866.
    A droite, l'Avenue du Général Leclerc, ainsi que le pont par lequel elle franchit le Ru de Bourdon ne fut percée qu'en  1884, pour desservir la toute nouvelle gare.
    Et la vue sur les 2 bâtiments (actuels Axa et  Bistrot) n'a été dégagée qu'en 2014 par la démolition du mur et du portail de l'ancien abattoir, remplacés par les places de parking.
    Plus anciennement, la place n'était qu'une petite rue, la rue des Tanneries, reliant le Pont des Augustins (près du monument aux morts actuel) au Pont des Religieuses (sous nos yeux). Trois tanneries ont existé entre cette rue et le Ru. Deux d'entre elles alimentées par un bief dont on peu encore voir  une arcade en brique dans le flanc droit du Ru, juste en face du Bistrot.
    La tannerie Mauplot, juste devant le Bistrot du Château, a été achetée par la commune et détruite pour élargir la rue du Petit Pont en 1839. Cette opération devait donc partiellement dégager la vue vers l'ancien couvent des Bénédictines qui deviendra à la fin du XIXe siècle école de garçons et école professionnelle, après remodelage des façades en conformité avec les normes architecturales édictées pour la nouvelle Avenue de la Gare qui venait d'être créée. C'est la mairie actuelle, derrière nous.

     

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    Inutilisés depuis des années, ces bâtiments ont retrouvé une nouvelle fonction et des travaux de restauration importants ont été engagés.
    L'aspect extérieur a cependant été préservé, seules les portes ayant été remplacées, mais dans un style tout à fait compatible, pour répondre aux nécessités d'accueil du public.
    L’architecture du restaurant est tout à fait traditionnelle: Angles et soubassements en pierre de fer, murs en roche et silex, entourages de fenêtres en briques bicolores, toit d'ardoise à 4 pentes. Côté rue, la porte cochère est solidement encadrée de pierres de fer soutenant un linteau de bois de grande dimension découpé en arrondi. La façade Nord (sur le Bourdon) est moins typique et plutôt disparate: étage en pan de bois avec remplissage de briques comme c'est le cas au Sud pour la liaison avec la "maison Lédé" à l'arrière du Bistrot.
    Le Bâtiment occupé par le Bistrot du Château appartenait jusqu'en 2018 à M. Safdar Butt qui l'utilisait comme entrepôt depuis 2002. Il l'avait acheté aux parents Baudot qui le tenaient eux-mêmes de Roger Pautrat.
    On ne connaît pas parfaitement son histoire, mais, au début du XXe siècle, il appartient au ferblantier Gustave Dubois qui avait sa boutique 9 rue Max Pautrat, boutique qui se prolongeait par son atelier en longueur rue du Petit Pont. D'après l'entête de ses factures, ses activités étaient très diverses (bicyclettes, chauffage, mécanique...).

     

    Le Bistrot du Chateau à St Fargeau

     

    La carte postale postée en 1906 (photo ci-dessous)  montre qu'il était également charron-mécanicien. Il occupait l'atelier, équipé d'une forge, où est installé maintenant le Bistrot du Château.

     

    Le Bistrot du Chateau à St Fargeau

     

    Gustave Dubois avait acheté la serrurerie de la rue de l'Horloge en 1898 ainsi que l'atelier et la maison rue du Petit Pont. L'entreprise avait auparavant appartenu à Louis Luneau qui la tenait de son beau-père Bourgeois, ferblantier.

     

    Le Bistrot du Chateau à St Fargeau

     

    C'est ce serrurier Louis Luneau, prédécesseur de Dubois, qui avait acquis la parcelle H218 en 1862, pour y construire en 1864 la maison et l'atelier qui est maintenant le Bistrot du Château.
    Louis Luneau, fils de serrurier, fut un entrepreneur important de St-Fargeau. Il compléta son métier de base en fabriquant des machines agricoles et surtout c'est lui qui fit de St-Fargeau, la 5e ville française électrifiée en 1887. L'usine électrique avait été construite au Moulin du Paradis en 1881 pour alimenter, en 1884, le château de St-Fargeau. Mais dès 1882, Louis Luneau demande l'autorisation d'enterrer des câbles électriques pour alimenter, depuis son usine du Moulin du Paradis, ses boutiques de la rue de l'Horloge. On peut penser qu'il alimenta également son atelier rue du Petit Pont.

    En remontant encore dans le passé, le plan de Massingi (1708),  indique qu'on est dans le quartier des boucheries. Ce qui est confirmé par le plan-cadastre (~1760) : le boucher Pierre Lechien possède  la boucherie (actuellement Fleurs du Beffroi) et la maison en pan de bois à l'arrière de la librairie. Sa belle-mère, la Veuve Lédé, est propriétaire de la maison située à l'arrière du Bistrot. L'abattoir (actuel AXA) ne semble pas exister: Il a dû remplacer plus tard deux maisons (Sieurs Rameau et Boulanger) dont les contours ne correspondent pas. Le terrain où est le Bistrot n'est pas bâti, pas plus que  sur le cadastre Napoléonien 1935 ("jardin" avec un petit hangar). Il sert sans doute de pré d'attente pour les bestiaux.
    Il faudra attendre 1864 pour que Luneau  y construise son atelier.

     

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    Pratiquement figé pendant tout le XXe siècle, ce quartier ancien renait tout en conservant l'architecture d'autrefois. Les deux nouveaux commerces, s'ajoutant à la boulangerie et au restaurant du Transvaal, redonnent de l'animation. L'évolution devrait se poursuivre avec les aménagements qui devront accompagner l'installation de la Communauté de Communes dans les locaux de l'actuelle mairie.

    On peut parier que le Bistrot du Château, de concert avec les autres commerces, sera pour les futurs agents intercommunaux un lieu de convivialité incontournable. 

     

     

                                                                                         Claude Lesire

     

     

     


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    Mercredi 25 aout 2021 une équipe d' Histoire et Patrimoine s'est rendue sur le site de fouilles archéologiques dans le bois de Bailly à St Fargeau .

    Françoise Lelard et Claude Lesire vous font part , chacun à sa façon ,  de cette visite :

      

     

    §  DES ARCHÉOLOGUES A LA RECHERCHE DES MÉTALLOS DES BOIS DE BAILLY

     

     Les randonneurs, les ramasseurs de champignons, les chasseurs qui arpentent les sous-bois dans notre forêt communale, savent-ils qu’ils cheminent sur d’innombrables  traces enfouies. Elles ont été laissées par des hommes qui, dès l’âge du fer ont mis en œuvre leurs forces physiques, leur intelligence, leurs savoir-faire et les ressources naturelles disponibles pour produire du fer. Ce sont les premiers métallurgistes ;

     En effet, les amas de scories provenant de la réduction du minerai de fer, bien connus sous le nom de « ferriers » sont présents, parfois à peine perceptibles, parfois amoncelés sur de larges étendues, en grand nombre et de manière concentrée en Puisaye. Ils ont fait l’objet d’observations partielles depuis le siècle dernier : inventaire et cartographie des sites, typologie des déchets, analyse des techniques sidérurgiques… On a ainsi pu évaluer à plusieurs centaines de milliers de tonnes la masse totale de ces déchets, dont une partie considérable représentée par le fameux ferrier de Tannerre résultant d’une activité sidérurgique intense à l’époque romaine.

     A l’échelle de la région, depuis le début des années 2010, un PCR (Projet Collectif de Recherche) rassemble un grand nombre de chercheurs (archéologues, ingénieurs, historiens, chimistes, topographes) autour de « la sidérurgie en Bourgogne-Franche-Comté avant le haut fourneau » ayant pour objectif «une caractérisation interdisciplinaire de l’organisation des activités sidérurgiques anciennes ».*

     En tant qu’ensemble majeur de sites de production, la Puisaye a été choisie afin de faire l’objet d’investigations plus poussées. Les premiers travaux  de prospection et de sondage réalisés sur plusieurs territoires de Puisaye ont permis d’identifier une activité sidérurgique continue entre l’âge de fer et l’époque carolingienne (entre le VIè siècle avt. J.C.et le Xè siècle de notre ère) avec une évolution des techniques de réduction du minerai. Ces prospections ont aussi permis de sélectionner des zones  de recherches afin d’y opérer des fouilles systématiques. Dans ce cadre, une zone de prospection, présentant de nombreux amas a été retenue dans nos Bois de Bailly.

     En 2017 et 2018, déjà, l’équipe d’archéométallurgistes dirigée par Marion Berranger* a investi notre forêt communale sur ces zones délimitées. Les nombreux amas de scories ont été prospectés de manière systématique avec un enregistrement topographique. Les datations radiocarbone ont permis de déterminer l’ancienneté  de l’exploitation sidérurgique, insoupçonnée auparavant. Celle-ci débuterait vers les VIè-Vè av.J.C.

     Parallèlement, les chercheurs ont commencé à approfondir l’étude d’un atelier de réduction. Un des amas protohistoriques situé dans le Bois de Bailly, facilement accessible, situé en bordure de chemin a été sélectionné pour une fouille en aire ouverte.

     Cette année, suite aux prospections géophysiques  effectuées en 2020 qui ont déterminé l’épaisseur de l’amas, le site a pu être décapé. C’est là que Marion Berranger et ses collaborateurs nous ont accueillis, par une belle matinée ensoleillée. Leur campagne de fouilles, après deux semaines de travail intense, touchait à sa fin. Nous avons découvert le chantier : trois aires de sondage décapées (sortes de tranchées), des buttes de terre végétale à réutiliser pour remblayer le site, et une multitude de caisses contenant les prélèvements échantillonnés destinés aux analyses de laboratoire. Le nettoyage et la fouille des structures mises au jour ont été effectués manuellement. En effet, la fouille doit combiner approche planimétrique et approche en coupe. L’examen de la coupe permet d’enregistrer les strates conservées et de réaliser des prélèvements de charbon et de scories sur ces différentes strates. En plan, les archéologues ont découvert les bases d’un four qui a été minutieusement dégagé, mesuré, photographié…

     Cette belle découverte constitue une réelle avancée dans les recherches sur cet atelier de production. Cependant, loin de combler l’attente des chercheurs, elle soulève une multitude de questions. Certaines trouveront leur réponse dans les résultats des analyses de laboratoire (analyse des charbons par un anthracologue, datations au Carbone 14). D’autres réponses seront à trouver encore dans de nouvelles fouilles sur l’atelier. S’agit-il d’un bas fourneau isolé, à usage unique ? ou, au contraire, est-il un élément parmi d’autres ? Se pose aussi la question de  l’implantation et de la nature des espaces habités, en relation avec  le site. Et puis quelles sont les modalités d’extraction et de circulation des matières premières (minerai, bois, argile, eau) ?....

     Nous n’en avons pas encore fini avec nos métallos des Bois de Bailly. Et c’est avec une curiosité enthousiaste que nous retrouverons, l’an prochain, cette équipe d’archéologues. Avec une grande bienveillance, ils ont su nous communiquer leurs connaissances très pointues et leur passion pour la recherche. Nous les remercions de tout cœur.

     

    *Les intervenants scientifiques sont : 

    - le Laboratoire de Métallurgies et Cultures de l’Université de Technologie de Belfort Montbéliard

    - le CNRS 

    - l’Institut de recherche sur les archéomatériaux 

    - l’INRAP

             Sous la direction de Marion Berranger.

     

                                                                                                         Françoise Lelard

     

     

     

    § Claude Lesire a sélectionné pour vous quelques pages du rapport triennal de Marion Berranger .

     

     

      ( Si vous souhaitez consulter ce rapport de 297 pages, n' hésitez pas à nous contacter )

     

     

     


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    Vous êtes invités aux Journée Européennes du Patrimoine

    le 18 et le 19 septembre 2021

    à St fargeau

     

    Journées Européennes du Patrimoine 2021

     

     

     

     

     

     

     

     


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     "Le Bulletin" numéro 3

     

    Chers amis,                                                                                                                                                   

    Comment rendre compte de la richesse et de toute la diversité des thèmes abordés dans notre BULLETIN n°3 ?                                                                                                                                  

    J’ai fait le choix d’un éclairage particulier et personnel.   

    RESSOURCES NATURELLES,  RESSOURCES HUMAINES

    Vous les rencontrerez au détour de chaque page ces femmes et ces hommes, ces familles qui, de tout temps à Saint-Fargeau, ont travaillé, inventé, fabriqué, créé… A partir des ressources naturelles, le bois, le fer et l’eau, ils ont forgé la vie sur notre territoire. Ils sont innombrables au cœur de ce Bulletin ; ils en  constituent le fil conducteur. Alors, suivons-les…

    Nous allons d’abord faire connaissance par leurs noms : des listes nominatives figurent dans chacune des parties du Bulletin.                                                                                      

    Ainsi, la liste des personnes imposables à Saint-Fargeau en 1790 et celle des personnes ou familles vivant sur le domaine du Comte Louis-Michel Le Peletier de Saint-Fargeau. Elles sont accompagnées du lexique des professions et rendent compte de l’étonnante vitalité de la vie économique à la fin du 18è siècle sur notre territoire. On peut en tracer l’évolution en les comparant avec la liste des plus imposés au rôle de 1881.                                                                                                               

    Tout aussi révélateur : l’extrait du recensement de 1911. Il précise le nom des hommes qui travaillent dans l’industrie du bois, alors en plein essor. On s’étonne de l’extraordinaire diversité des métiers et des compétences.

    Bien sûr, c’est en regardant les photographies illustrant chaque page que l’on saisit l’intensité des activités humaines aux différentes époques évoquées.                                                                               

    Pour l’exploitation de la forêt et la transformation du bois, on reconnaît des charbonniers, des bûcherons, des scieurs, charretiers, gardiens d’écurie et, sur la photo choisie pour la couverture, les beutiers, le comptable et le contremaître.

    On rencontre aussi des familles d’entrepreneurs audacieux et inventifs qui, à partir de la fin du 19è siècle, vont fonder une véritable industrie du bois à Saint-Fargeau. Entre autres, Albert Lesire, à l’origine marchand de bois et qui, associé avec Eugène Provot, crée « La Scierie du Château » en 1892 au Moulin de l’Arche. On estime que l’industrie du bois occupait au minimum cent personnes avant de péricliter dans les années 1980. Michel Provot, à son tour, se lance en 1965 dans la production du lamellé-collé, technique innovante qu’il développe au sein de la société «  Les charpentes de la Puisaye », avenue Michel de Toro.                                                                                                                                                                  Deux photos que je trouve particulièrement intéressantes et émouvantes sont celles éditées dans L’Yonne républicaine montrant les ouvrières de «  l’usine de couture ». Sur la première,  publiée à la fin des années 1960, on voit les « cousettes » qui fêtent « joyeusement la Sainte Catherine ». Sur l’autre, publiée en 1983 et qui a pour titre « Grève aux ateliers de Saint-Fargeau. Les locaux occupés », on voit les couturières en grève pour sauver leur outil de travail et leur emploi. C’était la fin de cette « usine de couture », usine éphémère qui, durant les trente glorieuses, a procuré du travail aux femmes.

     Que toutes ces figures, connues et inconnues, vous accompagnent, chers lecteurs, dans la découverte de l’histoire économique et sociale  de Saint-Fargeau présentée dans ce Bulletin. 

    Vous pourrez les retrouver aussi dans les traces qu’elles ont laissées dans nos forêts et dans le paysage urbain.

    Françoise Lelard

     

     

     

     

     


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    Suite à la parution de notre Bulletin numéro 3 . Véronique a recueilli le témoignage de Cécile Janin épouse Chambaud qui a travaillé à la scierie Lesire et Provot dans les années 40:

     

    « Travailler à la scierie dans la tourmente de la guerre »

    « J’ai travaillé dans cette usine près de la Tour pendant la guerre. J’étais entrée comme ouvrière, dans les années 42-43, à seize, dix-sept ans. Je coupais du bois avec une scie électrique puissante à dix lames, ce bois était destiné aux gazogènes, c’était plutôt dur mais j’avais été embauchée sous le nom auquel je m’étais présentée sans donner mon identité réelle. M. Comte, le patron qui habitait la Tour, était très compréhensif vis-à-vis des jeunes venus de Paris, qui étaient dans la Résistance ou qui fuyaient le travail pour les Allemands.

    Je venais de Villeneuve St-Georges, j’avais besoin d’un travail pour survivre. Ma mère et moi, nous étions cachées avec mon frère Robert, aux Briards dans les bois de Sepfonds car mon père Henri Janin, communiste était recherché par la milice et la Gestapo.Il nous avait demandé de fuir dans l'Yonne. Mon frère avait dix-huit ans et fut bucheron.

    C’est là que j’ai rencontré mon mari, René Chambaud. Il avait vingt ans et travaillait là lui-aussi. Il faisait de la charbonnette, il était « chauffeur », chargé d’entretenir le feu dans les chaufferies situées dans un bâtiment au fond de l’usine. Il venait parfois plus tôt, le matin, pour avancer mon travail et m’épargner ces heures de coupe.

    Mr et Mme Chambaud, ses parents, avaient compris ma situation et m’apportaient à manger, ils m’ont bien aidée pendant toute cette période difficile car je ne pouvais parler à personne. 

    Une chance, il manqua quelqu’un au bureau et il se trouve que je connaissais le travail de bureau, la dactylographie ! René alla dire qu’il connaissait quelqu’un au patron et me recommanda auprès de lui. Je revois le petit bureau dans la Tour où j’ai été dactylo après-guerre à partir de 45. A ce moment-là, je pouvais enfin donner mon identité. Mlle Bonnard s’occupait des papiers, je faisais les payes des ouvriers. »

     

     

     


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