• Mes arbres

     

     

                                                                     MES ARBRES

     

    De quoi rêve t-on lorsqu’on est en hiver ?

    Mais de l’été, bien sûr !

    Quand les arbres se détachent sur un ciel lumineux et que la brise tiède caresse leurs branches et fait danser les feuilles qui saluent en miroitant au soleil.

    Les arbres, les grands arbres qui se dressent, indifférents à l’agitation des humains, refuges débonnaires de tout ce qui vole, grimpe, picore, ronge ou grignote.

    j’aime les arbres ! Tous les arbres ! Mais il en est quatre chez nous, plus chers encore à mes rêveries.

    Voulez-vous que je vous les présente ?      

     

    Mon Géant expatrié

    Il vous est forcément arrivé de passer par la digue du Bourdon qui domine de plusieurs mètres un vaste parc en cuvette que fort peu de flâneurs prennent plaisir à visiter. Juché sur la digue, vous roulez ; Et irrésistiblement (un œil sur la route, tout de même !) vos regards se tournent vers l’étendue d’eau qui luit et se portent dans le lointain, vers les bateaux. De l’autre côté, vous devinez plutôt que regardez, une masse sombre d’arbres. Vous êtes à mi hauteur du bosquet d’épineux surgi des profondeurs de ce bel espace aménagé .

    Entraînée un soir par des amis (sans quoi jamais moi -même, je n’aurais songé à descendre dans ces profondeurs !) je me suis avancée vers ces sombres sapins plantés là. Et soudain, à demi caché  par leurs branches, un tronc admirablement dressé s’est imposé à moi ; un tronc énorme. Intriguée, je lève les yeux et mon regard monte, monte et n’en finit pas de musarder vers les hauteurs vertigineuses d’un séquoia inattendu, lointain petit cousin des séquoias de Californie. Il pousse , il pousse et veut comme eux un jour, atteindre leur envergure.

     

    « Rassure toi mon beau Géant transplanté!  Dans 200 ans tu les rattraperas et nous viendrons c’est sûr, te célébrer... »

     

     Mon Impertinent Incongru

    Lui, s’est campé bien en vue au bord de la route qui va de Mézilles à Saint-Fargeau. Que vous descendiez vers Mézilles ou que vous remontiez la pente pour retourner à Saint-Fargeau, de toute façon il s’imposera à vous, péremptoire. C’est un cèdre du Liban insolent et magnifique ; totalement incongru, posé là ! Rien ne justifie sa présence. Ni une vaste et noble demeure qu’il signalerait au passant curieux ni l’entrée d’une allée plantée d’arbres. Il a poussé comme il voulait et maintenant, dru, noir et triomphant, il se détache sur tous les cieux ; bleus en été, gris et changeants le reste de l ‘année. Mais quoi que l’on pense de son impertinence, que serait sans lui ce petit trajet de voisinage entre nos deux villages ?

     

    La route serait comme amputée de poésie. Et nous, nous en serions appauvris.

     

     

     

     

     Mon Narcissique Velléitaire 

    Mes arbres

     Ah lui, c’est un coquin ! Il est né dans le jardin du presbytère de Saint-Fargeau. Tout jeune il a senti qu’une mare voisine pourrait lui servir de miroir. Alors il a rampé de tout son tronc au ras du sol, passant sous le grillage, allongeant son corps sur le sentier qui borde la retenue d’eau au risque de l’obstruer tant il voulait se voir , se contempler avec complaisance dans les eaux de ce petit réservoir qui servit autrefois au Moulin de Paradis et aux commères du quartier pour laver leur linge, au lavoir.

    Mais arrivé là, Monsieur a été offusqué par la vue des lentilles vertes qui tapissent parfois sa surface  et répugné par les noires eaux quand elles sont chargées de boues. Le snob a changé d’avis. Il s’est redressé. Il a continué sa course à la verticale oubliant de ce fait son désir de s’abîmer dans les ondes.

    Et qu’il est drôle et beau pourtant ! Comment s’appelle t-il de son nom savant ? Dans mon pays natal, les paysans baptisent ses frères du beau nom de faillard. Il ne faut pas aller chercher bien loin le sens de ce vieux vocable qui évoque le feuillu dans ces contrées de montagne où les conifères sont les rois.

     

     

     

    Mon Bouquet Aquatique

    Lui aussi semble être un faillard. Enfin, je ne sais pas !                   Il a poussé au bord du petit étang de Lavau.

    Rêvant un jour sur un banc, je regardais à travers ses troncs miroiter les eaux vertes sillonnées par des portées de canards.

    Ses troncs oui ! Car je me suis avisée que j’en voyais plusieurs dressés en éventail tel un bouquet de fleurs. Comme c’est curieux ! On dirait qu’aucune des pousses à leur naissance n’a voulu céder sa place et élire un tronc parmi elles. On sent une compétition vitale féroce où personne n’a su gagner la première place. Et c’est tant mieux pour nous ! Les frères rivaux se penchent aujourd’hui de concert sur la berge et offrent leur ombrage à qui veut bien s’attarder.

     

     

     

     

      Et vous, avez-vous aussi vos arbres préférés, ces géants pacifiques qui adoucissent vos heures et enchantent vos vies ?

     

    Brigitte Demay de Goustine

     

     

     

     

     


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  • Commentaires

    1
    beckie luginbuhl
    Mardi 22 Décembre 2020 à 11:28

    Bravo Brigitte, vous avez brillamment mis en valeur ces vieux arbres devant lesquels nous passons sans leur accorder assez d'attention..et c'est vrai qu'ils font partie de notre paysage...et de notre plaisir d'être à la campagne...A bientôt près des vieux arbres.

     

    2
    poupie lelorrain
    Mardi 22 Décembre 2020 à 13:31

    merci de cette ravissante prose;ces arbres ,les arbres ,nos arbres,mes arbres sont  le coeur de ma passion  pour la Puisaye.

    Je les chéris ,les regarde... ah ce cèdre du Liban.!l y en a 4 je crois  dans les alentours ( cf cimetiere de St Sauveur,)

    merci de réveiller les fondamentaux!.



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